jeudi 10 novembre 2011

Bienvenue à Hoboken

Le décor peut lui aussi susciter une émotion. Le paysage que l’on voit ici dans la case finale du chapitre VIII n’est pas ce que j’appellerais idyllique, mais je le trouve particulièrement évocateur.

Il est inspiré d’Hoboken, New Jersey, municipalité portuaire et industrielle de l’agglomération new yorkaise où je n’ai jamais mis les pieds et qui n’est pas mentionnée dans le roman. Comme il s’agit d’une scène de transition, il n’en sera pas question non plus par la suite dans l’album. Le but était simplement de donner une ambiance.

L’image est inspirée d’Hoboken donc, mais inspirée seulement. Comme à mon habitude, elle ne correspond à aucune photo précise, mais est plutôt reconstituée à partir d’un amalgame de documents (pas évident de trouver des images d’Hoboken il y a un siècle, même sur Google). Comme à mon habitude aussi, tout est tracé à main levée.

Pourquoi Hoboken ? Pour l’atmosphère bien sûr, mais surtout à cause du nom : si on l’ampute de la dernière syllabe (comme sur le panneau à droite de la case), on lit le mot «hobo», qui correspond exactement à ce que Karl est devenu.

Les décors dans l’album ne représentent pas tant la grande ville, la mégalopole au centre du monde (à l’exception de la grande case suggérant Wall Street, au chapitre II, voir sur le blog 20 janvier 2009), mais plutôt les faubourgs, la banlieue, morne no man’s land, lieu insaisissable et indéfini entre la ville et la campagne.

L’Amérique recréée par Kafka demeure très européenne. C’est d’ailleurs ce qui fait la singularité des atmosphères décrites dans le roman. La mienne est tirée de mon imaginaire, qui est forcément plus nord-américain.

Il y a une autre différence entre son univers et le mien : l’époque, ou plutôt le point de vue sur l’époque. Le roman a été écrit et se situe vers 1912 ; c’est bien cette période que j’ai cherché à reconstituer, avec beaucoup de documentation et un peu d’imagination. Quelques souvenirs aussi, même si je suis né bien plus tard. Cependant, si cette époque est contemporaine de Kafka, elle ne l’est évidemment pas pour moi. Ce qu’il décrivait comme ultra-moderne revêt pour moi un caractère rétro et passéiste.

J’aurais pu transposer le roman en 2012. C’eût été intéressant, mais ce n’eût plus du tout été la même histoire.

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