vendredi 16 avril 2010

Carnets de croquis ou pas

Plusieurs dessinateurs de BD, et non des moindres, traînent toujours leur carnet de croquis dans lequel ils enregistrent tout ce qui leur passe par la tête ou sous les yeux. C’est sûrement un exercice salutaire, une excellente gymnastique, une source d’inspiration et une matière première pour l’artiste. Mais il faut comprendre qu’il y a dessin et dessin : les croquis n’ont en fait que très peu à voir avec le dessin de cases de BD, qui tient plus du langage codé que de l’expression spontanée. Pour emprunter une théorie à la mode, je dirais que les croquis relèvent du côté droit du cerveau, alors que les cases relèvent du côté gauche.

Pour ma part, c’est une habitude que je n’ai pas. Je devrais peut-être. À une certaine époque, le moindre prétexte était bon pour dessiner : je griffonnais dans mes cahiers de notes en classe, sur les napperons de restaurant, n’importe où. Mais c’était il y a très longtemps.

Je n’ai jamais été très porté par ailleurs sur le dessin d’après nature, sauf en cas d’absolue nécessité. Lorsque je partais en vacances, il m’arrivait d’apporter avec moi crayons et cahiers, mais ils restaient invariablement au fond de ma valise.

Peut-être que l’activité de dessiner pour dessiner ne me procure pas suffisamment de plaisir. Je suis comme cet auteur qui disait détester écrire, mais adorer avoir écrit. Pour que mon cerveau se mette en mode dessin, j’ai besoin d’un but précis, d’un problème à résoudre, d’une solution à trouver, lesquels découlent d’un projet, d’une histoire à mettre en cases (ou d’une illustration à livrer). Ce n’est que dans ces conditions que je me mets à explorer, à griffonner, à accumuler esquisses et essais, que je jette généralement au panier une fois la case terminée, parce qu’ils ne représentent alors plus pour moi la moindre valeur.



La faculté de dessiner est un muscle qui a besoin d’être entraîné. Ce n’est pas sans raison qu’on encourage les étudiants à dessiner et dessiner sans cesse et à noircir des pages de croquis. C’est on ne peut plus formateur et productif. Je devrais peut-être m’y mettre moi aussi si je veux continuer de progresser – on n’arrête jamais d’apprendre – sauf que je ne suis pas sûr que je me mettrais de cette façon à mieux dessiner.

Plus facilement peut-être.

1 commentaire:

  1. Très bonne analyse, enfin par expérience, j'ai envie de rajouter que les carnets de croquis ont en eux-même un langage, différent de celui de la bd, très particulier et pas encore franchement déchiffré. Et d'ailleurs, en voyant les oeuvres d'une auteure comme Natacha Sicaud, on peut avoir envie de l'exploiter encore plus.

    En tous les cas, j'ai très hâte de voir L'Amérique ou Le Disparu enfin fini.

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